Pourquoi est-ce que je soutiens Nibombé Waké ?

Publié le par Gerry

http://external.ak.fbcdn.net/safe_image.php?d=AQDdV_pwjpK1VTMt&url=http%3A%2F%2Fi2.ytimg.com%2Fvi%2FekhoeA03wpU%2Fhqdefault.jpgJe me suis retrouvé mêlé dans cette affaire parce que, comme à mon habitude, je crois que toutes les causes sont bonnes à prendre.
Un jour, il y a environ un mois de cela, je retrouve dans un groupe facebook, une vidéo réalisée par le reporter Noel Tadegnon, et traitant vaguement d’une interview de Nibombé Waké. Au départ, je n’y prête pas trop attention. Ma connexion est trop faible pour lire la vidéo. Un peu plus tard dans la journée, un autre ami sur facebook me demande de diffuser cette vidéo depuis mon profil, comme tenu de la fréquentation de celui-ci. Je le fais, et aussitôt, les réactions fusent. Avant la fin de la journée, j’ai reçu plusieurs requêtes d’envoi de fonds à Nibombé. Je consulte l’ami qui m’a envoyé la vidéo. Très rapidement, l’idée de monter un comité de soutien prend forme. Avec la connexion 3G de Togocell, je finis par visionner la vidéo sur mon portable. Ce que raconte le monsieur est proprement hallucinant. C’est bon, il faut l’aider.
La suite ira très vite. Une rencontre est fixée avec lui. Nous sommes quatre, il répète la même histoire. Qui relève du cauchemar. Revenu de Cabinda avec une blessure par balle au mollet, il n’a jamais été pris en charge ni par la Fédération, ni par le gouvernement. Il a reçu en tout et pour tout 720 000 de l’ANC, assureur de l’équipe nationale lors du déplacement en Angola.
Comme à mon habitude, la machine s’emballe. J’appelle certains médias avec lesquelles j’ai des rapports. J’accompagnerai Nibombé à la TVT, ensuite, dans l’mission très suivie de Kanal Fm, le club de la presse. Le propos ne change pas, je suis toujours aussi bouleversé. Dans la semaine, plusieurs autres médias se saisissent du cas Nibombé, et en profitent aussi pour régler certains comptes personnels. Dans la foulée, le ministère des Sports réagit, organise une conférence de presse où il prend à contre-pied certaines des déclarations de Nibombé. Il y est dit qu’au retour de Cabinda, le gouvernement a versé à chaque joueur 8 millions, qu’ils auraient reçus en tout, pour cette compétition, 23 500 000F. toute notre équipe est atterrée en entendant cela. Notre ami ne nous avait pas parlé des huit millions. Bien entendu, dans la foulée, je l’appelle. Il me doit des explications. Il reconnait avoir reçu cette somme. Je suis furieux. Avec l’équipe, la discussion nait. Que faut-il faire ? Laisser tomber, poursuivre ? Les avis sont partagés. Il faut de nouveau le rencontrer. Cette fois, j’y vais seul, à cause de la proximité de domicile. La discussion est franche, et sincère. Il reconnait avoir merdé pour les 8 millions, mais pour lui, cet argent n’était pas destiné à se soigner. Il avait entamé des projets qu’il a voulu poursuivre, avant de s’arrêter net et utiliser le reliquat pour se soigner. En suis-je convaincu. J’avoue que j’ai un malaise. Mais un tout autre sentiment m’anime. Il  y a une certitude qu’on ne peut pas tronquer. Cet homme souffre. Il a du mal à marcher, sa jambe droite est atrophiée. On va l’aider. Donc, on organise une conférence de presse.
Je suis de retour de cette conférence. Elle était destinée à lancer les activités du comité de soutien. Si les médias nous suivent, nous pouvons lever des fonds pour lui. Même si mon malaise n’est toujours pas dissipé. En pleine conférence, d’autres détails, gênants, sont apparus. La NSIA assurait les blessés pour une hauteur de 5000 000. Pourquoi Nibombé n’a-t-il pas continué à présenter ses factures à la société d’assurance? Un journaliste a soulevé le cas d’une ancienne blessure au genou. Je ne connaissais pas ce détail, mais voilà un ensemble d’éléments qui me plongent dans le doute, et la gêne. Est-ce encore raisonnable de poursuivre cette action ?
Et là, je réponds Oui. Parce que Nibombé souffre réellement, et est plongé dans le dénuement. Mais il souffre de deux types de blessures. L’une est physique. Qu’on le veuille ou pas, l’homme a des problèmes de motricité, a une jambe atrophiée, et marche avec une béquille. On ne va pas non plus soutenir qu’il fait exprès de marcher avec ce support rien que pour nous berner, alors qu’il a plus à gagner à reprendre sa place d’entraineur de gardiens de l’équipe nationale. La seconde blessure, et la plus profonde est morale. Elle est due à l’abandon et à l’absence de reconnaissance. Que presque personne du monde sportif ne s’intéresse à lui le perturbe. Le manque de soutien moral chez cet homme, jadis adulé, est une souffrance atroce. Voilà pourquoi je continue, et je continuerai, même après l’existence de ce comité, à le soutenir. Toute nation qui n’honore pas ses héros est destinée à l’annihilation. Rien que le chercher pour l’installer dans une tribune lors des matchs internationaux lui serait gratifiant.
 A-t-il commis des erreurs d’investissement ? Sans doute, même si 8 millions, en deux ans pour un malade, c’est vite parti. Est-il sincère ? Quant aux douleurs, oui. Quant aux objectifs qu’il vise en sortant de son mutisme, je n’en sais rien. Et je ne veux rien en savoir. Il est possible que demain, et je l’ai déjà entendu, que certains nous accusent de récupération. Sincèrement, je m’en tamponne le coquillard. En usant de nos facilités respectives, les membres du comité de soutien se sont engagés dans une action citoyenne. Si elle porte ses fruits, ils seront remis à Nibombé. Si ça ne marche pas. Nous aurions au moins essayé. Nous n’aurions pas baissé les bras.
Alors, toi qui lis ces notes que je jette hâtivement sur mon blog avant de quitter mon bureau, si tu tiens toi aussi à célébrer tes héros nationaux, à les aimer tels qu’ils sont, pour le rêve qu’ils t’ont apporté, et le sentiment de fierté nationale qu’il ont su te communiquer, va sur le site nibombewakeup.org, et fais un don suivant tes moyens. Tu ne sauveras pas le monde avec ça, mais tu bâtis par ce geste une nouvelle nation togolaise: solidaire, reconnaissante et généreuse.

Publié dans Info togolaises

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